D’une bassesse à l’autre
d’un reniement à l’autre
d’une infamie à l’autre
ah, si au moins c’était
le vieux chemin de la
trahison
menant Judas aux Romains
ah, si au moins c’était
le triste baiser
qui envoya Jésus de Nazareth à
la croix
et le félon avec ses trente
deniers
à un olivier tordu
se balancer de contrition,
pendu.
Non, de nos jours
seuls les trahis ont honte et
mal
et faim et froid, désespérant
de tout
et y compris de soi
pour les Judas modernes trahir
c’est un dévoilement joyeux
c’est naviguer heureux
d’enfin jeter ses masques
dans l’océan
lâchant justice, espoir et vérité
ces vieux accoutrements attrape-nigauds
à l’eau, à l’eau, à l’eau.
Dans l’abandon ravi de tout
serment
tient leur destin
libres d’attaches ils vont
vers le festin
corsaires, pirates :
voguez !
Là où on leur dit de danser, ils
dansent
là on leur dit de tuer, ils
tuent
les yeux fixés aux drapeaux
hissés très haut
inextricablement liés
le bleu aux étoiles d’argent et
d’or
le noir à la grande tête de
mort.